Il enseigne au Temple, comme chaque dimanche matin. Les scribes et les pharisiens sont là, dans la foule venue célébrer l'eucharistie.
Parmi les chrétiens, il sont les plus fidèles à la Parole, à la fois pour la méditer et la mettre en pratique. En toute bonne foi, il disent : “Seigneur, Seigneur, n’est-ce pas en ton nom que nous avons prophétisé, en ton nom que nous avons expulsé les démons, en ton nom que nous avons fait beaucoup de miracles ?" [Mt 7,22].
Jean n'utilise qu'UNE fois le mot "scribes" dans son évangile. Les scribes sont tout proches du Dieu UN. Tout proches, ou concurrents ?
L'expérience de la lectio divina peut éclairer cette question. Il arrive que j'en reste à la seule mise en oeuvre de mes capacités humaines pour comprendre le texte. Il arrive aussi qu'une fois travaillé, je le laisse agir en moi. Ce qui survient (l'Esprit ?) descend alors du ciel.
Le paradoxe, c'est que si je me crois capable de laisser l'Esprit prier en moi, c'est sûrement que je ne le laisse pas agir !
Ils amènent une femme. Jean met plusieurs fois en scène une femme : la mère de Jésus à Cana et au pied de la croix, la samaritaine, Marthe et Marie, Marie de Béthanie, Marie de Magdala.
Le grand enjeu est l'Alliance du ciel et de la terre. Jésus est l'époux légitime. Mais son épouse est entre les mains de Satan. Depuis qu'elle a été tentée [Gn 3], la femme humanité est adultère. Il est le mari trompé, trahi.
Et même crucifié.
Les scribes et les pharisiens lui amènent donc cette femme coupable. Regarde ce qu'elle a fait. Regarde les guerres, la planète polluée, l'argent fou, les inégalités, la faim...
Cette femme fait tellement souffrir ton Corps, elle te crucifie encore chaque jour. Ne faut-il pas l'empêcher de nuire ? N'est-ce pas ce que dit la Parole de Moïse, ta Parole ?
Ils le mettent à l'épreuve. « Toi qui détruis le Sanctuaire et le rebâtis en trois jours, sauve-toi toi-même, si tu es Fils de Dieu, et descends de la croix ! » [Mt 27,40].
Mais au lieu de faire appel aux légions d'anges, Jésus se baisse encore davantage. Il écrit sur la terre. Puisqu'il est le Verbe, on pourrait dire qu'il s'écrit sur la terre.
On aimerait "savoir" ce qu'il écrit.
Il écrit dans le cœur de chacun. Il se révèle à chacun. Il s'agit d'une relation intime, une relation d'amour.
Il se révèle aux scribes et aux pharisiens.
Peut-être que l'un est confronté à l'énigme : comment détruire le mal, puisqu'il est dit "tu ne tueras pas" ? Il croyait savoir, et voilà qu'il réalise qu'il ne sait plus rien.
Jésus se redresse, parle de pierre, et s'abaisse à nouveau.
Les pensées de ses interlocuteurs, fins connaisseurs de la Torah (surtout les plus vieux ?), s'orientent vers cette pierre.Les uns et les autres se retrouvent infiniment pauvres, démunis. ils ne "savent" plus. Ils s'éloignent en méditant. En priant peut-être.
La femme est toujours là, au milieu. Mais au milieu du jardin déserté par les savants, il n'y a plus l'arbre de la connaissance du bien et du mal. Il n'y a plus de juges. Il n'y a plus la loi qui mène à la mort [refer St Paul]. Il n'y a plus que l'arbre de Vie : la croix [Gn 2,9].
« Moi non plus, je ne te condamne pas. Va, et désormais ne pèche plus. »
A cette femme accusée, Jésus ne propose pas encore les noces. Ce serait aller trop vite. Il murmure dans un souffle à peine audible, comme un amoureux qui craint d'effaroucher sa dulcinée : si tu le veux, je te libère de ton geôlier.
Un jour, peut-être, elle se souviendra de cette humble prière. Un jour, peut-être, elle se lèvera et reviendra à Lui.
Elle s'est levée et est revenue à Lui. Le mariage a été célébré : Jésus, voyant sa mère, et près d’elle le disciple qu’il aimait, dit à sa mère : « Femme, voici ton fils. » Puis il dit au disciple : « Voici ta mère. » Et à partir de cette heure-là, le disciple la prit chez lui. [Jn 19,26-27]
Bien sûr, épouse et mère, c'est tout un : la mère est l'épouse qui enfante.
Voici que tu vas concevoir et enfanter un fils ; tu lui donneras le nom de Jésus [Lc 1,31].
L’enfant qui est engendré en elle vient de l’Esprit Saint ; elle enfantera un fils, et tu lui donneras le nom de Jésus [Mt 1,20-21].
Il s'agit du mariage de Joseph et Marie. Du mariage de Jean et de la mère. Du mariage des scribes et des pharisiens avec la femme adultère. De tous les mariages, de toutes les alliances qui mettent au monde Jésus, le germe divin donné à Adam créé "homme et femme" [Gn 1,27] : il s'agit du Christ et de l'Église.
C'est la fête, la fête eucharistique, le repas de noces. Alleluia !