Bible / Lumière sur l'abîme
MàJ 1 juillet 2017

Touche-t-on le fond de l'abîme ?

7 novembre 2011
On tente de maintenir les déficits budgétaires à leur niveau prévu
(80 milliards en 2012...) avec un placebo de 65 milliards en 4 ans.
La poursuite de l'augmentation de la dette rend la faillite inévitable.

La situation de la France et de l'Europe échappe désormais à tout contrôle.

Ce faire-part de décès date de 2011. Je ne me doutais pas que nous étions loin d'avoir touché le fond.

Quand le mur de Berlin est tombé, le modèle capitaliste occidental a remplacé le communisme.
Nouveau séisme, nous vivons ce que certains nomment une crise systémique, la fin de la société de consommation. Mais cette fois-ci, nous ne savons pas ce qui la remplacera.

L'argent nous rend malades.
La spéculation boursière est le symptôme des uns. D'autres jouent au loto, au poker ou au tiercé. A chacun son addiction.
Les politiques se disent médecins. Ils sont porteurs du virus et très contagieux. Ils soignent les alcooliques que nous sommes avec... du vin. En cas de suffocation, ils passent au cognac, pour retarder la mise en bière.

Depuis qu'on s'en inquiète, jamais le niveau de la dette n'a augmenté aussi vite.
L'écart entre riches et pauvres ne fait qu'augmenter.
Les vraies questions écologiques sont étouffées pour ne pas remettre en cause la croissance (voir l'exemple de l'industrie automobile). La décroissance, inéluctable, est encore niée ou noyée dans des discours contradictoires. Même les "verts", en parlant de "croissance autre", entretiennent l'ambiguïté.
Regarder la réalité en face (écouter un interview de 50' de Yves Cochet de 2013) serait un préalable à toute action constructive.

Paroles du Christ
L'évangile serait-il la planche de salut ? Lisez deux pages inspirées du livre de Michel Henry "Paroles du Christ"

La réalité, c'est le travail de deuil que chacun doit faire, le deuil de l'argent.
Arrêter de chercher fébrilement où cacher mon argent (ou comment en avoir, si je n'en ai pas), mais accepter que ce fantôme n'existe plus. Et le vivre comme une libération.

Il est rude d'ouvrir les yeux. L'abîme donne le vertige. On préfère se tourner vers le ciel.
Mais le ciel n'est pas dans les nuages. Il est au fond. Au fond de nous-mêmes.
Plonger est le seul chemin. Ceux qui l'ont vécu intérieurement peuvent l'affirmer : La vérité nous rendra libres.

Un témoignage parmi bien d'autres : celui du chirurgien orthopédiste Vincent Pointillart. Constatant les limites de sa science, il se met en route (voir une vidéo de 45').

Ce qui s’ouvre, c’est ce grand, cet immense espace-temps qui est celui du Nouveau Testament, ouvrant l’avenir jusque par-delà l’horizon du temps, faisant éclater l’espace jusqu’aux limites de l’humanité, de l’univers – et par-delà.
Et ce lieu, dans le Nouveau Testament, c’est bien la crise, krisis, jugement ; non point comme retrait ou désolation, mais comme passage d’une intensité insoutenable, puisque la Parole y meurt, celle où Dieu enfin se manifestait en ce monde.
Maurice Bellet, 2002

 

Le remède à l'angoisse est à l'intérieur de chacun

L'horizon est bouché, quel est le chemin ?

Et si l'homme n'était pas qu'un animal intelligent ? Si sa vocation était plus grande que de consommer ?
Faut-il se tourner vers le ciel ? Nos satellites n'ont rien trouvé, Dieu s'il existe est loin et muet.

Et si le "ciel" était au-dedans de nous ? Tout proche...
Impossible à prouver, c'est une expérience. Tout à coup, plus d'angoisse. Une paix, une lumière qui ne vient pas d'ailleurs mais qui est à l'intérieur. Peut-être une expérience unique dans ma vie, mais depuis, je "sais", d'une certitude absolue... sans pouvoir nommer ce que je "sais".

Je cherche alors à retrouver le chemin du ciel entrevu.
Si je rentre en moi-même, c'est plutôt l'enfer que je découvre. Des peurs, des colères, des tristesses, une affectivité blessée. Des passions. Une sarabande d'idées qui tournent dans ma tête comme des animaux sauvages. Une respiration oppressée, un corps crispé. Je suis le jouet de fantasmes, de fantômes.
Reculer ou plonger, pas d'autre alternative.

Non pas contourner, mais plonger là où l'angoisse est la plus forte. L'éclairer. Entrer dans les parties de mon corps qu'elle oppresse. Expirer, lâcher.
Regarder avec tendresse mes animaux sauvages, pardonner leurs bêtises, les apprivoiser.

Le vide remplace alors peu à peu les fantômes.   Une Présence se révèle.   Une justesse s'installe dans ma vie.

La peur frappe à ma porte.   Je vais ouvrir.   Il n'y a personne.

 


Qu'est-ce que l'homme ?
Descente du "paraître" à l'être essentiel

Je dis, j'écris, je fais

1995, réunion "qualité" en entreprise. L'animateur nous explique que la qualité, c'est la cohérence entre dire, écrire et faire.
Trinité du paraître ! Mais descendre plus bas, ce serait s'immiscer dans la vie personnelle de chacun.

Notation annuelle. Cette nouvelle manière de manager fait des vagues.
J'explique que c'est la contribution aux objectifs de l'entreprise qui est évaluée, et non pas les personnes. On est dans une relation marchande, donnant-donnant.
Une relation schizophrène, où je ne m'intéresse qu'à une partie de l'autre ?
Mais si le chef devenait un gourou, ce serait pire. Se limiter à ce qui concerne l'entreprise, c'est respecter l'autre, lui laisser la responsabilité de sa vie.

Je pense, je décide

Je suis maître de moi comme de l'univers (Corneille, Cinna)
C'est assez naturellement l'idéal que l'on va s'efforcer d'atteindre. Combien d'échecs faudra-t-il pour chercher ailleurs ?

Sentiments

Côté agréable, la joie. Côté désagréable, la peur, la colère, la tristesse.
Je n'en suis pas le maître, et donc je n'en suis pas moralement responsable. Qu'en faire ?
Les porter à la lumière.
Les reconnaître, pour que mon comportement ne soit pas influencé inconsciemment par eux ?
Ou les exprimer, reconnaître mes fragilités, me rendre vulnérable, pour créer des relations plus vraies avec les autres ?

Instincts

Dieu dit : « Faisons l'humain à notre image, selon notre ressemblance. Qu'il soit le maître des poissons de la mer, des oiseaux du ciel, des bestiaux, de toutes les bêtes sauvages, et de toutes les bestioles qui vont et viennent sur la terre. » (Gn 1,26)
Nous sommes capables de dominer sur les "animaux" qui grouillent en nous, et invités à le faire.
Non pas avec notre volonté qui ne suffirait pas, mais parce que nous sommes créés à l'image de Dieu.

L'âme

Dieu créa l'humain à son image, à l'image de Dieu il le créa, il les créa homme et femme. (Gn 1,27)
Nous sommes crées "homme et femme", "corps et âme", "terre et ciel", "extérieur et intérieur".
L'image de Dieu est en nous en germe, comme un enfant à mettre au monde. Sa croissance est le chemin vers la ressemblance avec Dieu.

Je suis

L'horizon est de devenir un être unifié.
Sur ce chemin, l'ego s'efface peu à peu.
Jusqu'où ? Pour les chrétiens (passage par la mort) comme pour les bouddhistes, jusqu'au bout.

Alors, que restera-t-il ? Qui suis-je ?
Le Christ n'est que accueil (il reçoit tout du Père) et don (il ne garde rien pour lui). Seul, il n'existe pas.
"Je suis" n'existe pas sans l'Autre et sans les autres.

 

La paix intérieure peut-elle changer le monde ?

Le début de ma démarche a été de mettre en évidence des dysfonctionnements majeurs dans notre modèle économique capitaliste, nécessitant de le remettre en cause dans ses principes.
La racine de ce mal est notre frénésie d'avoir "toujours plus", pour masquer notre angoisse existentielle : je ne sers à rien, je suis seul, je vais mourir.
La suite (Bible et zazen) témoignera d'une démarche intérieure permettant d'affronter cette angoisse, de trouver la paix.

Comment cette libération - personnelle, ou vécue dans un petit groupe - de l'addiction à l'argent va-t-elle influencer ma manière d'être dans le monde économique ? Est-elle susceptible, et comment, de "changer le monde" ?

1. Témoigner

La première piste est de témoigner, de me consacrer à la promotion d'une démarche intérieure libératrice, et de laisser à d'autres les problèmes du monde économique. Cette attitude aurait une double justification :
- Mes moyens, mon temps et mes capacités sont limités, à chacun ses charismes.
- Si l'angoisse existentielle demeure, aucun système économique, ne traitant par nature que "l'extérieur", ne sera satisfaisant. A supposer même que l'on parvienne au plein emploi et à une éradication de la pauvreté, le monde sera loin du bonheur et le cherchera sans fin dans d'autres comportements suicidaires. A quoi bon dépenser de l'énergie dans une bataille perdue d'avance ?
Quelle différence entre Pierre Rabhi et José Bové ?
Les deux se sont engagés pour l'écologie : la santé et la planète sont menacés par la soif de profits.

Le premier rayonnait la paix, la joie.
Quel est son secret ?

2. Juxtaposer

La seconde piste est de cultiver une force pour d'affronter les problèmes du monde. La démarche intérieure serait ma "potion magique" me permettant de rester calme dans la tempête, de ne pas (trop) souffrir dans les difficultés de toutes sortes. Mon calme pourrait aussi être un moyen de donner envie à d'autres de prendre le même chemin.

3. Intégrer

La troisième piste est radicalement autre. L'objectif premier n'est plus de supprimer la souffrance, les injustices, mais il est de donner sens à notre vie : l'essentiel est la relation.
Tisser des liens plutôt qu'accumuler des biens.
L'argent n'est plus une idole, une finalité, mais le symbole d'une vie d'échanges : une icône.

Le mal sous toutes ses formes devient ce qui va nous mettre en mouvement. Il va nous mobiliser ensemble, et donc nous ouvrir à l'altérité. De la "mort" émerge l'espoir partagé d'une vie nouvelle. Nous ne sommes pas seuls.
Au lieu d'être consommateurs, nous devenons des co-créateurs exerçant notre liberté. La surprise, l'émerveillement devant l'inattendu remplacent la sécurité du connu. Notre vie prend du sens.

La faiblesse, le manque, l'erreur deviennent l'occasion de dire : j'ai besoin de toi, de ton pardon. La vie n'est pas capitalisée, elle circule dans le "recevoir" et le "donner". Elle grandit dans la reconnaissance de nos différences (riches / pauvres...), pierres d'achoppement qui deviennent pierres fondatrices.

La démarche d'intériorité donne cette expérience que c'est en perdant tout que je reçois tout.
Quand une faille apparaît dans les belles idées que j'exprime pour un monde économique meilleur, elle est cette ouverture qui permet à l'autre d'entrer chez moi, ce vide qui lui donne de la place.

Cette dernière partie est le fruit de la lecture du livre de Elena Lasida "Le goût de l'autre"

Bienheureux les fêlés car ils laisseront passer la lumière (Michel Audiard)