Le surendettement
Pourquoi continue-t-on à prêter à de probables insolvables ?
C'est que le système y trouve son intérêt. Démontons le mécanisme, d'abord pour un particulier.
Au commencement
La publicité soutenue par des offres de crédits faciles sévit. Le consommateur tenté s'y laisse prendre, il emprunte. Au taux fort bien sûr (proche de 20%), car c'est un client à risque.
Ses échéances sont prélevées chaque mois aussitôt après l'arrivée de son salaire.
En fin de mois, il est en découvert. La banque le tolère, mais lui facture aussi 20% d'intérêts.
L'enlisement
D'autres emprunts se succèdent. Au bout de 5 ans, les intérêts payés dépassent le capital restant à rembourser : les créanciers sont devenus gagnants.
Mais la situation financière est critique. Les retards de paiements se succèdent, sanctionnés eux aussi par des pénalités.
La vente du patrimoine
C'est la seule solution pour desserrer l'étau. Hélas, les objets séduisants achetés chers dans les rayons sont quasi invendables. Des vautours en profitent.
La patate chaude
Les créanciers sont maintenant conscients de l'insolvabilité. Banque, société de crédit, loyer, électricité, téléphone, eau... chacun menace pour tenter de rafler avant les autres les maigres revenus mensuels. Le jeu, c'est de faire que ce soit l'autre qui reste avec un gros impayé au moment de l’hallali.
Ce jeu peut durer : tant qu'il y a des revenus à prendre... c'est mieux que rien...
La fin
L'huissier sonne l'arrêt de la partie. Le patrimoine résiduel est saisi, non pas pour sa valeur (une misère), mais pour l'exemple. Le consommateur est exclu du monde économique, il devient SDF.
Le cas des États
Il est identique.
La tentation initiale, c'est de dépenser sans prélever d'impôts.
En Europe, on en est à la phase de la patate chaude. Les créanciers tentent de mettre leurs gains à l'abri d'une hausse des impôts (paradis fiscaux) ou d'une faillite (achat d'or). On fait durer le jeu : tant qu'il y a du gras sur la bête, c'est bon à prendre. Le gras, ce sont par exemple les biens bradés à bas prix par les États ou les particuliers pris à la gorge.
Après les pauvres, ce sont les classes moyennes qui sont dépouillées : on augmente les impôts sans toucher à la fortune des très riches. La bulle des dettes et des créances, c'est à dire l'écart entre les pauvres (endettés) et les riches (créanciers) continue à croître au son de "il faut soutenir la croissance". Les initiés comprennent, il s'agit de la croissance de la bulle bien sûr !
Les français sont menés à l'abattoir, à la suite des grecs.
L'hallali
Après le nazisme et le communisme, c'est au capitalisme de révéler son hideux visage.
Mon père a passé 4 ans prisonnier en Allemagne. On se demande encore comment il a été possible que des millions d'hommes, allemands mais aussi français, aient pu prêter leur concours au nazisme.
En rentrant, après quelques années de galère comme chauffeur routier, il a développé avec succès une société de crédit automobile. Une nécessité, pour subvenir aux besoins de sa famille (6 enfants). Il m'a dit une fois : "n'emprunte jamais pour acheter une voiture !". Quel soulagement, à sa retraite, de pouvoir s'orienter vers des activités altruistes désintéressées !
L'assureur propriétaire de cette société de crédit a accumulé une des toutes premières fortunes de France. Mais dans les années 70, croissance et inflation masquaient les effets pervers du système.
On se demandera bientôt : comment se fait-il que tant de français (et j'en suis) aient prêté leur concours au capitalisme ? Qu'ils aient creusé leur propre tombe ?
Je penserai à mon père. D'abord victime d'une idéologie, il a été acteur de la suivante.