Bible / Comment lire la Bible / La lectio divina
MàJ 9 janvier 2020

Lectio divina : mémoire, parole, prière

La lectio divina est une manière de lire la Bible qui nous vient des Pères de l'Église (et des juifs). C'est une pédagogie qui aide à entrer dans les quatre sens de l'Écriture.

1. Mémoire

Le lectio divina commence par la mémoire du texte. On peut ajouter à la lecture attentive certains éléments plus savants : lire plusieurs traductions, vérifier le texte grec ou hébreu, situer le texte dans le contexte historique et culturel où il a été écrit, lire ce qui est avant et après le passage étudié.

C'est une phase factuelle. Pour recevoir la Parole telle qu'elle est pour moi aujourd'hui, dans ses aspects qui me plaisent et dans ceux qui me dérangent, il importe de ne pas interpréter trop vite – et même, de lâcher ce que je crois savoir. Sinon, je risquerais de tourner en rond dans mes idées ou dans des interprétations précédentes ou savantes.

2. Parole

Elle se poursuit par la parole questionnante : qu'est-ce que Dieu veut me dire, à moi, aujourd'hui ? Je demande, je cherche, je frappe, avec deux repères pédagogiques utiles :
  1. M'intéresser à ce qui me surprend dans le texte. Ce que je n'avais jamais remarqué, ce que je ne comprends pas, ce qui me choque. C'est comme Moïse : il allait vers la montagne de Dieu, et il voit un buisson étrange. Il se détourne de sa route pour voir... et Dieu est là !
  2. Éclairer les mots et images obscurs en faisant des correspondances avec d'autres passages bibliques employant les mêmes mots, les mêmes images. C'est la Bible qui est à elle-même son propre "dictionnaire", c'est elle qui peut donner un sens symbolique à telle ou telle image.

Des correspondances entre la Bible et les symboles liturgiques permettent de rentrer dans le sens profond des sacrements.
Des correspondances entre la Bible et ma vie font rentrer dans le sens existentiel.

Je reste dans le texte (et pas dans mes idées), ouvert, vigilant : l'esprit survient là où je ne l'attends pas. Cela peut durer quelques minutes, quelques jours, ou plus...

3. Prière

Elle se termine par la prière. Non pas ruminer mes pensées, mais laisser l'Esprit prier en moi à partir du texte. Pour cela, je peux mêler mes mots à ceux de la Bible (psaumes...).

Lectio individuelle ou communautaire

La lectio divina peut être vécue individuellement, comme les moines la pratiquent. Mais la vivre en groupe est une grande richesse : les autres vont m'aider à sortir de mes habitudes, de mes ornières mentales, à m'ouvrir à l'inconnu. Ils sont avec moi le corps du Christ. Dans un groupe de lectio divina, la parole est donnée à chacun. Il n'y a pas de savant, de référent veillant à une juste interprétation. Voir la page Animer un groupe biblique pour avoir plus de détails, et lire le document LectioDivinaComment.pdf (5 pages).

Ceux qui ont une certaine expérience pourront comparer avec d'autres démarches, très différentes même si elles semblent avoir des points communs.
Le site http://lectiodivina.catholique.fr/ ne met pas l'accent sur les aspérités du texte (ce qui m'étonne) et sur les correspondances, mais dès le début sur l'ambiance de silence / prière. La lectio divina en groupe, appelée aussi groupe de prière, commence dans un lieu de type chapelle. Elle est en fait personnelle (en silence), et suivie d'un court partage qui n'est pas un débat, ni une recherche collective. Il s'y ajoute un "enseignement" préparé et des questions / réponses animées par une personne "compétente".
Le site jésuite Notre Dame du Web propose un feuillet "Vers Dimanche" invitant à une méditation quotidienne personnelle de type ignatien sur les textes du dimanche suivant. Pour Ignace la composition du lieu consiste, à propos de la lecture d'une page d'Écriture, à prendre le temps d'imaginer, de composer mentalement de façon imaginale les éléments du lieu, de la scénographie, pour y faire place à la gestuelle... En effet, pour notre époque, les mots sont des concepts, du moins des signes de concepts, ce qui laisse place à la nécessité d'imaginer, alors que dans une pensée symbolique il n'y a pas cette dissociation. On peut dire qu'entre la composition du lieu au sens ignacien et la mise en espace symbolique, il y a à peu près la différence qui existe entre une toile de Véronèse et une icône. Chez Véronèse, les détails illustrent l'essentiel. Les détails spatio-temporels d'une icône sont l'essence. La Bible est une icône.
Les articles de wikipédia sur les quatre sens de l'Écriture et la lectio divina montrent à la fois une diversité de sensibilités et de vocabulaires, et un accord de fond sur l'essentiel.

Les pélerins d'Emmaüs (Lc 24)

Ce texte splendide, à relire attentivement et à confronter à notre expérience, raconte l'histoire d'une lectio divina.

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